Dans les dernières semaines, j’espérais que les Canadiens de Montréal se replaceraient et que leur directeur général renouvellerait son contrat. Malheureusement, dimanche dernier, les choses se sont passées autrement. Un homme de hockey de qualité qu’on gagne à connaître, que j’ai appris à connaître et surtout à aimer, s’est fait congédier de l’équipe alors qu’il était toujours en quarantaine après avoir contracté – et été terrassé littéralement par – la COVID-19. Marc Bergevin, qui était directeur général de la formation depuis neuf ans et demi, a payé le prix d’un début de saison 2021-22 difficile et de la grogne des partisans, qui réclament – probablement à tort – des échanges, des congédiements et une reconstruction. J’ai écrit dans un autre billet que je ne crois pas que ce soit une bonne idée.
Ce congédiement m’a scié les deux jambes, pour la première fois de ma vie, alors que d’habitude, chaque nouvelle du genre reçoit de moi un gros «Bof, la vache…». J’étais profondément attristée que du jour au lendemain les hautes instances des Canadiens de Montréal ne lui fassent plus confiance. Mais j’ai été émue de voir que Bergevin est parti avec grande classe et un respect immense envers l’équipe qu’il a servie de tout son cœur, sa déclaration que j’ai lue à haute voix devant mari et enfant en faisant foi.
D’accord, j’avoue ne pas avoir compris toutes ses décisions, transactions ou choix de repêchage. Je me suis longtemps demandé, entre autres, pourquoi en pleine saison COVID-19 (2021) il a changé d’entraîneur-chef. C’était le 24 février 2021, je n’ai pas vu le point de presse, mais j’ai attendu le match du lendemain avec tant d’impatience, afin de voir enfin la binette du petit nouveau (Ducharme) derrière le banc.
Ma réaction, en voyant ses cheveux blancs bien coiffés et ses yeux bleus enflammés au-dessus de son gros masque KN95, fut un magistral pétage de plombs ponctué de larmes et de sacres devant mon téléviseur. Je voulais lui arracher la tête!!!!
« Marc Bergevin, quossé que tu fais là? [mots d’église] Tu as congédié un coach récipiendaire du Jack Adams et qui a mené les Bruins à la Coupe Stanley en 2011, [mots d’église], tu prends son seul adjoint qui parle français, pis tu le crisses derrière le banc en lui disant de se débrouiller! Sérieux là, il va se planter et tu vas le jeter à la poubelle au printemps prochain, ça ne marche pas! T’es malade??? [mots d’église] Ah! Le pauvre Dominique… »
J’ai eu tort, Ducharme ayant réussi à mener l’équipe en finale de la Coupe Stanley, et c’est un entraîneur que j’aime particulièrement depuis cette saison rocambolesque, notamment pour son calme olympien et son attitude de battant dans les moments difficiles. Ce fut d’ailleurs la dernière fois que j’ai pesté contre le travail de Bergevin; je dirais même que le choix de Logan Mailloux, après avoir vidé la question et entendu plusieurs points de vue, ne m’a pas incommodée dans la mesure où le jeune homme veut se reprendre en main, car je crois qu’on a tous droit à une seconde chance et qu’on peut se réhabiliter. J’ai moi-même eu droit, à quelques occasions, à une seconde chance, ce qui m’a permis d’avancer dans la vie. Et j’ai connu quelques personnes qui ont eu droit à une seconde chance, et qui sont de bons citoyens aujourd’hui.
Par après j’ai su, d’une amie très proche de moi, que non seulement Marc Bergevin s’est donné corps et âme et même plus à l’équipe, aimant tout son monde très fort, mais il a beaucoup redonné à la communauté. Et plus près de moi, cette amie a pu compter sur son aide dans une situation très difficile dont je vous ferai grâce des détails. Il l’a aidée de toutes les façons qu’une personne peut aider. Changement du tout au tout. Derrière le bum aux costumes anticonformistes, aux cheveux longs et grisonnants, aux innombrables tatouages et aux biceps monstrueux pour un gars de son âge, se cache un homme au grand cœur, qui est d’une générosité sans borne. J’ai eu tort de l’avoir critiqué. C’est pour cela que son congédiement m’a tant dévastée dimanche dernier.
Bergevin avait sans doute des couilles d’acier parce qu’il n’a pas eu peur de faire certains échanges, dont celui de PK Subban en retour de Shea Weber, et pour avoir choisi de garder Carey Price et de laisser aller Jaroslav Halak… Shea Weber s’est avéré un leader très fort, un guerrier, et il est allé au bout de ses capacités physiques pour ne pas dire au-delà, parce qu’il voulait la Coupe l’été dernier. Je le répète, mais pour moi c’est un capitaine. La possibilité qu’il ne revienne jamais au jeu m’attriste profondément, car c’est un des joueurs et autres hommes de hockey qui m’ont attachée à l’équipe.
L’équipe ne sera plus la même sans Marc Bergevin, je suis d’ailleurs un peu angoissée (à tort ou à raison) à l’idée de voir peut-être un changement trop radical. Et j’espère que l’équipe gardera son âme, son noyau, et sa profondeur, tout ça étant le fruit de son travail des neuf dernières années et demie. Tout bouleverser, à mon avis, serait une erreur qui pourrait retarder de plusieurs années la 25e Coupe Stanley que nous voulons tant pour l’équipe.
Cela dit, je n’ai aucun contrôle sur la situation, bien que je préfère que l’équipe reste à peu près la même en y ajoutant de la profondeur, comme Marc l’a fait au cours des dernières années. J’ai connu une reconstruction à Québec (Nordiques) et c’est long, et les fans du CH auront beau la réclamer, dans les faits ils veulent une équipe gagnante et la Coupe Stanley à la fin de la saison, sinon c’est la déception, le chialage et le lynchage public des principaux hommes de hockey qui y travaillent. Ce sont mes observations personnelles. Dieu seul sait si j’ai tort. On verra pour la suite.
Merci beaucoup, Marc! Merci de m’avoir transmis ta passion, merci pour ta générosité, merci d’avoir aidé mon amie, merci pour ton travail magistral des dernières années. Je n’oublierai jamais cette saison 2021 et le parcours fantastique de l’équipe jusqu’à la finale de la Coupe Stanley. L’équipe portait ta signature en plus de celle de Dominique Ducharme et de ses leaders.
Je te souhaite beaucoup de bonheur et de nouveaux défis. Merci d’avoir fait de moi une fan du Bleu-Blanc-Rouge, chose que je n’aurais jamais envisagée il n’y a pas si longtemps que ça. J’espère pouvoir te le dire de vive voix, si c’est possible.